Transformations et pertes d’azote dans les différents compartiments aquifère-sol-atmosphère. Cas d’une exploitation agricole du bassin d’Orgeval.

Auteur.e.s

M. Benoit, J. Garnier, G. Billen, B. Mercier, A. Azougui, G. Afonso, J. Anglade, P. Ansart, J. Tournebize, G. Tallec

Université

UMR Metis, UPMC/CNRS, UR HBAN, IRSTEA

DOI
https://doi.org/10.26047/PIREN.rapp.ann.2013.vol04

L’azote (N) est un nutriment indispensable à la croissance des plantes, mais lorsqu’il est présent en excès dans l’écosystème, des contaminations ont lieu vers les hydrosystèmes sous forme de nitrate (NO3) ou vers l’atmosphère sous forme de protoxyde d’azote (N2O), gaz à effet de serre dont le potentiel de réchauffement est 298 fois plus élevé que celui du dioxyde de carbone (CO2). Dans le bassin de la Seine, grand producteur de céréales, l’utilisation croissante d’engrais en agriculture conventionnelle (AC) depuis les années 70, est reconnue comme responsable des pollutions diffuses (Directive Nitrates n°91/676/CEE) et des émissions élevées de N2O (croissance de +22% entre 1990 et 2011, CITEPA, 2013). L’agriculture biologique (AB) en grandes cultures, n’utilise pas de pesticides et remplace les engrais de synthèse par des engrais organiques. Toutefois les dynamiques de transfert de l’azote dans le sol et les pertes dans les aquifères et l’atmosphère ne sont pas bien renseignées. L’objectif de cette étude a été de mesurer les fuites d’azote dans une exploitation mixte (AB/AC) de grande culture céréalière, sur un sol limoneux argileux drainé, du bassin d’Orgeval. Cette exploitation a été équipée en bougies poreuses et en chambres d’accumulation de gaz à effets de serre (manuelles et automatiques), pendant deux années culturales (2011-12 et 2012-13), ce qui a permis de reconstituer les rotations théoriques. Des analyses de sols (texture, matière organique, nutriments, pH et reliquats azotés) ont également été réalisées. L’itinéraire technique du système AB se caractérise par une rotation de 7 ans, commençant par deux années de luzerne et une fertilisation organique principalement apportée par de la vinasse de sucrerie (90 kgN.ha-1 .an-1 ). La rotation AC est de 3 ans avec comme cultures majoritaires du blé, la betterave et le pois, et un apport d’engrais minéral moyen de 160 kgN.ha1 .an-1 . Au cours de ces deux périodes (2011-12 et 2012-13), les températures moyennes ont été de 9 et 11°C, respectivement ; les pluviométries en valeurs cumulées de 684 et 563 mm ; des évapotranspirations de 596 et 432 mm ; et les lames d’eau des drains de 50 et 220 mm. Les émissions de N2O présentent des pics d’émission au printemps et à l’automne (entre 10 et 50 gN.ha-1 .j-1 ), où les applications des engrais organiques ou minéraux sont associées à des températures clémentes (temp.>10°C) et à des épisodes pluvieux favorisant les processus de dénitrification. Pendant les deux années de mesures, les émissions cumulées de N2O sont de l’ordre de 0.3 à 2 kgN.ha-1 .an-1 pour une parcelle, ce que nous estimons correspondre à environ 10% de l’azote total émis sous forme de N2. Les mesures en chambres automatiques permettent de confirmer et d’affiner ces résultats. Les quantités d’azote lixiviés au cours des rotations AB et AC sont en moyennes de 9.6 et 16.6 kgN.ha-1 .an-1 respectivement, avec des quantités lixiviées faibles pour les légumineuses (2 à 5 kgN.ha-1 .an-1 ) et élevées pour les cultures postlégumineuses fertilisées, 25.7 et 49.5 kgN.ha-1 .an-1 en AB et AC respectivement. Enfin, dans le sol, l’azote total correspond à environ 6% de la matière organique. Sa minéralisation en l’absence de prélèvement par les plantes explique en grande partie la valeur du reliquat azoté minéral (NO3, NH4, NO2) qui, en entrée d’hiver, atteint des valeurs de 100 kgN.ha-1 (REH). Les mesures montrent que la lixiviation hivernale concerne 15 % du REH en AB et 50 % en AC, tandis que la volatilisation en élimine 16 % en AB et 23 % en AC.

marie.benoit@upmc.fr