Métabolisme des eaux du bassin de la Seine au regard de la matière organique

Sous la direction de Nicolas Flipo

Le cycle du carbone est fondamentalement lié au vivant, et est au coeur de la notion d’Anthropocène (Crutzen, 2002), qui incarne l’altération des grands cycles naturels par l’humanité jusqu’à avoir franchi des seuils d’irréversibilité par rapport à l’ère de relative stabilité géologique qu’est l’Holocène (Rockström et al., 2009). Même si des frémissements se font sentir dès l’Antiquité, cet emballement n’a démarré qu’au début de la révolution industrielle. Deux cents ans auront ainsi suffi pour dévier de la stabilité d’une ère qui en comptabilise 11 700.
Le carbone est ainsi un élément constitutif du métabolisme des organismes, du métabolisme des rivières au sens de balance entre production et consommation de matière organique, mais également du métabolisme territorial, qui désigne l’ensemble des flux d’énergie et de matières mis en jeu par le fonctionnement d’un territoire donné (Barles, 2018). Ces trois métabolismes ont notamment en commun de consommer de l’énergie pour produire, entre autres, de la matière organique, et de générer des émissions de gaz avec des effets radicalement opposés : oxygène versus gaz à effet de serre comme le dioxyde de carbone ou le méthane. 
Depuis 2006, un bilan du carbone émis à l’échelle globale est produit par une large communauté scientifique. Pour sa dernière version en 2023, il apparaît que les émissions de CO2 atteignent des sommets jamais égalés à hauteur de 10 GtC.a−1. En moyenne, sur la période 2013-2022, le bilan carbone global identifie 9,6 GtC.a−1 d’émissions de CO2 par combustion, et 1,1 GtC.a−1 du fait des changements d’occupation du sol (majoritairement par destruction de forêts) (Friedlingstein et al., 2023). Ces émissions sont compensées par deux puits majeurs de carbone : les sols et la végétation (-3,3 GtC.a−1), et les océans (-2,8 GtC.a−1). Ainsi, chaque année depuis dix ans, la moitié de nos émissions par combustion est stockée dans l’atmosphère, mais cette évaluation n’intègre pas un certain nombre de processus comme les émissions de méthane liées à l’élevage, dont le pouvoir réchauffant est bien supérieur à celui du dioxyde de carbone.

Ce bilan n’intègre pas non plus le métabolisme des eaux de surface (rivières, lacs, et réservoirs) et estuariennes, qui contribue à l’émission de 0,75 GtC.a−1 supplémentaires vers l’atmosphère (Cole et al., 2007). En acceptant l’idée de l’atteinte d’un net zéro en termes de bilan carbone, les émissions des milieux aquatiques prendront un poids significatif dans le bilan carbone global. Il est donc important d’en préciser les mécanismes. Cet objectif a motivé de nombreux travaux du PIREN-Seine depuis son origine. Ils sont structurés autour de deux axes : observation et modélisation.