Maïa Akopian, Josette Garnier, Maïté Desruelle et Jean-Philippe Debruine
UMR Sisyphe 7619 UPMC/CNRS
Le traitement des problèmes d’eutrophisation dans la Seine, a nécessité une connaissance approfondie de la dynamique du phytoplancton en rivière et de son contrôle par les facteurs hydrologiques et météorologiques, nutritionnels mais également biologiques. Sur la base d’expériences en laboratoire, un modèle de la dynamique du phytoplancton a été élaboré (Garnier et al., 1995; Garnier et al., 1998). Moyennant une analyse fine des contraintes (géomorphologie, hydrométéorologie et apports nutritionnels -Si, N, P, diffus et ponctuels-), nous avons confronté les simulations aux observations in situ des variables de la qualité de l’eau (biomasse phytoplanctonique et nutriments en l’occurrence). Nous avons alors montré qu’outre un contrôle “bottomp up”, le phytoplancton était soumis à un contrôle “top down” qui ne pouvait pas être le zooplancton seul, comme c’est le cas en milieu lacustre. En effet, le temps de séjour des eaux dans les rivières de l’ordre 4 à 5 est généralement insuffisant pour le développement de grands filtreurs efficaces tels que les cladocères (leur temps de génération est de l’ordre de 3 semaines). Le potamoplancton animal atteint des densités importantes seulement dans les exutoires des grandes rivières du bassin de la Seine (Marne, Oise) et dans la partie estuarienne (Akopian et al. 2002). En revanche, l’abondance de larves de Dreissènes (effectifs larvaires atteignant 5000 ind. l -1) dans les échantillons du plancton, ont permis de considérer le mollusque benthique Dreissena polymorpha, comme un facteur de contrôle essentiel de la biomasse algale (e.g. Caraco et al. 1997 ; Akopian- Ter Ovanessian, 1999). Grâce à une méthode de calcul proposée par Testard (1990), nous avons pu, à partir d’une quantification des flux larvaires et d’une analyse des cohortes, estimer les densités d’adultes fixés pour quelques tronçons de rivières (la Seine à l’aval de Paris notamment, Akopian et al., 2001). Sur ces bases, le compartiment des Dreissènes a été pris en compte dans le modèle du fonctionnement écologique comme une contrainte imposée a priori (Garnier et al., 1999). Notre objectif est de progresser dans la compréhension de la dynamique de ce mollusque invasif avec l’aide de la modélisation: ce travail présente l’originalité d’appréhender la dynamique d’un organisme au cycle biologique complexe. Le modèle sera avant tout un outil de compréhension pour répondre à des questions telles que: Quels sont les facteurs qui conditionnent l’émission des larves, la colonisation des fonds des rivières ? L’invasion est-elle le fait de la canalisation, i.e. de la création de site favorable à la fixation ? Est-elle le fait de l’eutrophisation ? L’invasion modifie t-elle la structure et le fonctionnement des communautés en place? Quel est son impact sur la biodiversité ?